Défaits à Stamford Bridge (2-0) sur des buts de Schürrle et Ba, les Parisiens voient leurs rêves de dernier carré s'envoler. Jamais dans le coup, dépassés par les événements, les hommes de Laurent Blanc peuvent s'en vouloir de ne pas avoir répondu présents dans les moments clés.
Ba, le sauveur de Chelsea, fan du PSG. |
Le football est un sport cruel. Alors
que le PSG semblait avoir réalisé le plus dur à l'aller en
s'imposant avec deux buts d'écart (3-1), le club de la capitale a
subitement vu son parcours européen s'arrêter une nouvelle fois en
quarts de finale. Une fois de plus, les buts à l'extérieur auront
eu raison du PSG, 3-3 sur l'ensemble des deux matchs, comme face à
Barcelone la saison passée. Sauf que cette fois-ci, la défaite fait
plus mal et la désillusion est plus grande. Novices, pas sûrs de
leurs forces et respectant trop un Barca diminué, les Parisiens
devaient se servir de cette élimination pour espérer aller plus
loin cette saison. Face à une équipe moins joueuse, avec une réelle
envie de produire du jeu, une expérience plus grande, les Parisiens
se sont pris les pieds dans le plat et peuvent nourrir des regrets.
L'échec face à Chelsea était-il évitable ?
Une gestion contrastée des événements
Comment aborder un tel match, c'était
la question principale de l'entre deux-matchs côté parisien.
Attaquer, défendre, attendre, partir à l'abordage, tant de
solutions qui s'offraient à Blanc, mais qui après coup, ont été
mis de côté par le tacticien du PSG. Et pourtant, le club de la
capitale partait avec un avantage précieux, en jouant face à une
équipe qui était obligée de se découvrir, de laisser des espaces,
d'être un peu moins maîtresse des événements, de jouer avec une
épée de Damoclès au-dessus de la tête. Il n'en a rien été.
Pas à un seul moment, Chelsea a paru
inquiété par le PSG. Pire encore, l'impression dégagée par les
acteurs du match, le déroulement de la partie, poussaient à croire
que Paris allait céder, non pas parce que Chelsea était au-dessus
d'un point de vue technique, mais parce que le PSG n'a pas suivi un
fil directeur qui lui aurait permis de déstabiliser son adversaire.
Chelsea n'a pas été impressionnant d'un point de vue purement
technique et footballistique. Là où le club londonien a montré
qu'il était un grand club, c'est qu'il a su alterner entre périodes
de possession, de pressing, sans s'affoler et se soucier ni du temps
qu'il restait à jouer, ni du résultat.
Durant la première demi-heure, les
Parisiens ont géré, essayant de produire du jeu sans être
dangereux dans les zones critiques. Chelsea a semblé tranquille, sûr
de sa force, attendant de trouver la faille pour passer à l'étape
suivante. L'ouverture du score de Schürrle est l'élément
déclencheur de la seconde phase des Blues : la pression. Menés,
les Parisiens ont été étouffés par Chelsea, n'arrivant que très
rarement à ressortir le ballon et à en faire bonne utilisation. Là
où Chelsea a été très fort, c'est que le club anglais a continué
le pressing après la mi-temps, comme s'il n'y avait pas eu de
coupure. Les Parisiens, pas habitués à subir, se remettent
difficilement dans le bon sens, et profitent du fait que Chelsea
baisse délibérément le pied, pour les faire sentir en confiance et
faire remonter le bloc.
Plus le match avançait, plus les
Parisiens ne savaient plus quoi faire, s'il fallait attaquer ou
défendre la maigre avance dont ils disposaient. Une situation
difficile à gérer, car chaque décision prise par l'entraîneur,
chaque geste effectué par un joueur, compte et peut avoir de lourdes
conséquences sur l'issue de la rencontre.
La faillite des éléments-clés
La défense parisienne n'a pas été au
niveau. Elle n'a pas pris l'eau, elle a réussi à museler les
attaquants de pointe censés être les plus dangereux sur les deux
matchs, mais a été le symbole de cette élimination du PSG. Thiago
Silva, meilleur défenseur du monde pour beaucoup, fêtera ses 30 ans
avant de voir un jour le dernier carré de la compétition. Le
capitaine Parisien n'a pas été le moins bon, mais sa fébrilité
sur certaines actions est symptomatique du mal parisien lorsqu'il
s'agit de se mettre sur le mode défensif. A de nombreuses reprises,
le numéro 2 du PSG a dégagé le ballon loin devant, en touche,
alors qu'à l'accoutumée, il aurait tranquillement cherché à faire
la première passe utile à la construction du jeu.
Dans son sillage, ses deux compères
Brésiliens, ont été d'une faiblesse rare. Alex a paru complètement
dépassé, en retard sur plusieurs actions, Maxwell, lui, est fautif
sur le second but en laissant Ba tout seul face à Sirigu, après
s'être fait bouger à maintes reprises par Willian. Jallet, bon à
l'aller, a lui aussi souffert face à Oscar, même s'il n'est pas à
blâmer sur cette rencontre. Au milieu, Verratti a paru lui aussi à
côté de ses crampons, montrant qu'il est le patron lorsque le PSG
va bien, mais déjouant totalement, et parfois tout seul et de
manière incompréhensible, lorsque le PSG a besoin d'un joueur qui
stabilise le milieu. Motta a été le meilleur parisien, toujours au
niveau, tandis que Matuidi, qu'on attendait tous dans ce genre de
rencontre où il peut montrer qu'il est un besogneux et que Paris a
besoin d'un joueur comme ça, a livré une prestation très moyenne.
Cavani, qui réclamait à cor et à cri
une place d'attaquant de pointe, devra trouver un meilleur moment
pour faire part de ses caprices. Comme depuis le début de l'année,
l'Uruguayen a livré une prestation indigente, trop quelconque pour
pouvoir mettre son équipe sur les bons rails. L'ancien Napolitain
est l'exemple typique de l'attaquant en vogue qu'on aime mettre en
avant, mais qui n'a jamais prouvé qu'il pouvait être l'homme
providentiel dans les moments clés, à l'image d'Agüero qui n'a
jamais su réaliser ses prouesses du championnat en Champion's League
avec City, et bien d'autres attaquants qui ratent la marche quand on
les attend au tournant. Lavezzi et Lucas ont paru esseulés, sans
point d'appui dans l'axe pour pouvoir s'articuler autour et permuter
d'un côté à l'autre. L'attaque parisienne a été individualiste,
un comble quand on sait que pendant de longues années, la star de
cette équipe était taxée de ce mal.
L'ombre d'Ibrahimovic
La star de cette équipe a laissé un
vide trop grand pour que Paris puisse s'en sortir par le jeu.
Beaucoup de supporteurs parisiens et de fans de football reprochent à
Ibrahimovic de s'effacer dans les gros matchs de Ligue des Champions,
regardent ses performances avec dédain et trouvent même que Cavani
ferait un meilleur travail s'il était à sa place. C'est négliger
l'importance du Suédois que d'avancer de telles choses. Ibrahimovic
a la spécificité d'être un des seuls joueurs au monde à être au
four et au moulin, dans le bon comme dans le mauvais, en ayant une
place prépondérante dans tout ce qu'effectue son équipe, plus
encore depuis qu'il est au PSG. Comme Messi face au Bayern, à 10% de
ses capacités, qui ne peut pas empêcher son équipe de couler, ou
Ronaldo face à Dortmund, qui a vu son équipe se faire balader en
son absence.
Auteur d'un match moyen à l'aller, il
n'avait pas été épargné par les critiques. Après l'élimination
du PSG à Stamford Bridge, la réalité est la suivante : avec
un Ibrahimovic moyen, Paris gagne 3-1. Sans Ibrahimovic, le PSG perd
une deuxième fois par plus de deux buts d'écart alors que ça ne
lui était arrivé qu'une fois en 111 matchs. Le rôle de l'ombre de
l'attaquant Suédois, celui qu'il effectue lorsqu'il ne marque pas un
but dans un match, est aussi important que son impact sur le jeu
parisien. A l'aller et face à une équipe regroupée, le géant
Suédois s'est sacrifié au milieu du quatuor
Terry/Lampard/Ramires/David Luiz, pour permettre à ses coéquipiers
d'avoir plus d'espaces, d'où les bons matchs de Lavezzi et des
latéraux. Son repli défensif, sa présence dans les zones clés,
son aura, sont autant de paramètres qui ont cruellement manqué au
PSG à Londres.
Aussi bon soit-il, Cavani n'a pas les
épaules pour remplacer Ibrahimovic. L'Uruguayen n'a ni la forme, ni
le talent, ni la carrure pour avoir les responsabilités du Suédois,
qui insuffle à ses partenaires la hargne et l'envie de vaincre. D'un
point de vue strictement tactique, l'absence d'Ibrahimovic a été
catastrophique. Alors qu'on pensait que la présence de Cavani à son
poste préférentiel, entouré de deux ailiers virevoltants,
suffirait à faire sauter le verrou londonien, beaucoup moins
resserré qu'à l'aller, ce match nous a confirmé que sans
Ibrahimovic, rien n'est pareil. Le Suédois organise le jeu en
redescendant d'un cran, soulageant ses milieux et laissant ses deux
coéquipiers de l'attaque se projeter vers l'avant. Ibrahimovic est
la pièce maîtresse d'une tactique bien huilée, qui sans lui, n'a
ni queue ni tête.
Le bleu Blanc
La machine huilée que Blanc a créée
est sympathique à voir jouer. Seulement, elle est intouchable en
Ligue 1. En Champion's League, l'histoire est différente, et Blanc
se doit, se devait d'avoir des plans autres que celui du « jeu,
jeu et jeu ». Prétention, inconscience ou philosophie
jusqu’au-boutiste, Blanc a failli et s'est trompé sur toute la
ligne, chose que l'on redoutait avant même le match aller. En
l'absence d'Ibrahimovic, Blanc devait trouver une solution à son
4-3-3, qui n'aurait de toute façon pas été le même avec l'absence
d'un tel joueur, qui à lui seul arrive à créer le mouvement.
Vouloir marquer est une chose, penser
que l'on peut avoir les mêmes résultats en termes de construction,
de finition, en remplaçant uniquement les joueurs au poste pour
poste est l'erreur fatale de Blanc. Cavani en pointe, ce n'est pas
Ibrahimovic, l'articulation avec les joueurs qui l'entourent n'est
pas la même, l'équilibre n'est plus aussi flagrant. Sa volonté
systématique de remplacer Verratti à l'heure de jeu par Cabaye, est
une des incompréhensions qui entourent le coaching de Blanc,
n'arrivant pas à se montrer prévisible et trop frileux pour
chercher à consolider son milieu de terrain en laissant des joueurs
techniques sur la pelouse, pour mieux contrôler le ballon, au profit
de Matuidi par exemple.
En face, Mourinho tente des choses,
déséquilibre son équipe dans le but de déstabiliser totalement
l'équipe adverse. Il finit le match avec David Luiz au milieu, un
joueur qui est habituellement défenseur, et cinq joueurs à vocation
offensive dont trois attaquants de pointe et un ailier. Même avec
une équipe aussi offensive, dépourvue de point d'appui au milieu,
Chelsea a su rester solide et a créé un mouvement plutôt que de
rester cantonné à une formation spécifique. Blanc n'a pas su
répondre à cette initiative de Mourinho, n'a jamais su quoi faire,
n'a pas tenté de semer le trouble dans la tête des Londoniens en ne
changeant pas de cap et en voulant gagner comme il a l'habitude de le
faire, sans avoir le souci de s'adapter.
Faire rentrer Pastore à vingt minutes
de la fin est un choix que l'on peut juger discutable. L'entrée du
Parisien, plutôt bonne, a apporté des solutions que le PSG semblait
chercher pendant plus d'une heure. Une titularisation de l'Argentin,
excellent dans les petits espaces et capables de se défaire de la
pression adverse grâce à une nonchalance qui l'a toujours servie
dans les gros matchs, aurait pu permettre à Cavani d'être mis dans
de meilleures dispositions. Au lieu de ça, Blanc a donné le bâton
pour se faire battre et a répondu au coaching de Mourinho par un
« blindage », en sortant Lucas pour Marquinhos, le seul
et unique changement qui n'a pas été du poste pour poste sur les
deux confrontations, à moins de dix minutes du coup de sifflet
final.
Tout n'est pas à jeter pour Blanc.
L'entraîneur français a réalisé du bon travail jusque-là, mais
on ne peut s'empêcher de penser que malgré un visage plus
attrayant, une meilleure maîtrise du ballon que la saison passée,
le PSG s'arrête au même stade de la compétition avec plus de
regrets. Sa volonté de toujours jouer, de ne pas chercher à
répondre par une nouveauté en matière de plan de jeu, d'avoir mal
géré les événements, lui ont coûté cher. Le pragmatisme de
Mourinho et de bien d'autres entraîneurs a manqué à Blanc, qui
doit se servir de cet échec pour mieux aborder ce genre de
rencontres.
Expérience, Ligue 1,...
La question de l'inexpérience du PSG à
ce stade de la compétition revient beaucoup pour justifier l'échec
du club de la capitale. Oui et non. Il est indéniable que Chelsea,
qui a mis presque dix ans pour soulever la coupe aux « grandes
oreilles », à la suite de très nombreux investissements, est
un club qui a de la bouteille, qui sait comment aborder ce genre de
rencontres. Son vécu, ses échecs, ses victoires, tant de choses qui
font que les « Blues » savaient très bien où ils
mettaient les pieds. Mais après un match aller où il réussit à
faire plier le club londonien, Paris avait-il besoin de cette
expérience pour réussir à gérer un score que l'on peut juger
« suffisant » ? Dortmund est arrivé en finale en
2013, en écrasant ses adversaires et en jouant toujours de la même
manière, après s'être fait lamentablement éliminer la saison
précédente. Expérience ? Le Porto de Mourinho venait de
gagner l'UEFA, et s'est facilement imposé en 2004. Expérience ?
Plus que l'expérience, Paris n'a pas
su répondre présent quand il le fallait. Il est anormal qu'un club
qui a de telles ambitions, se fasse rouler dans la farine comme il
l'a été à Stamford Bridge. L'absence d'Ibrahimovic est
préjudiciable, mais elle ne doit pas être à ce point handicapante.
Ramires absent au retour, Hazard qui sort prématurément sur
blessure, Chelsea n'a jamais donné l'impression d'être victime des
aléas du match, et a montré à Paris qu'il était un bloc qui ne
dépend pas d'une individualité. L'expérience, c'est face au Barca
que Paris est allé la chercher, les joueurs qui composent l'effectif
ont pratiquement tous connu des grands moments dans leurs carrières
respectives. Cette défaite est un échec cuisant dont il faudra se
relever si le club parisien veut atteindre le dernier carré dans les
années à venir.
La Ligue 1 risque-t-elle de devenir un
handicap pour le PSG ? Il est fort probable que ce soit une des
raisons qui expliquent l'incapacité du PSG à montrer du répondant
face à des adversaires costauds. Les Parisiens se baladent en
championnat, et font face à des équipes qui sont maintenant
résignées à l'idée de les affronter, alors que la saison passée,
elles leur donnaient un peu plus de fil à retordre. Chelsea a
l'habitude de ce genre de confrontation dans son championnat, même
si les caractéristiques du PSG sont inédites et qu'il existe peu
d'équipes munies d'autant de bons joueurs à tous les postes en
Premier League. Mais là aussi, cela ne semble pas un motif suffisant
pour expliquer le non-match des Parisiens à Londres.
Les Parisiens ne peuvent s'en prendre
qu'à eux-mêmes. Chelsea n'a pas été extraordinaire, mais a montré
un visage digne des meilleures équipes européennes. Sa capacité à
ne pas tituber, à gérer les moments forts et moments faibles, à
constituer un bloc équipe, fait de ce club une véritable plaie à
jouer. Paris n'aura réalisé qu'une seule bonne période sur les
quatre. Trop peu pour prétendre au carré final, mais encourageant
pour la suite car il faudra chercher à se perfectionner dans les
moments clés.
Ibrahimovic aurait-il pu envoyé le PSG dans le dernier carré? |
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