mardi 18 mars 2014

Thomas Müller, l'homme des grands rendez-vous

Joueur essentiel dans le rouleau compresseur du Bayern Munich, Thomas Müller reste une personnalité à part dans l'effectif bavarois. Dans l'ombre des ailiers qui forment le "Robbery" et des deux monstres de la maison, Lahm et Schweinsteiger, Thomas Müller répond toujours présent quand son équipe a besoin d'un coup de main. Quel rôle a-t-il eu dans le succès actuel du Bayern Munich? Portrait d'un joueur façonné par "la rigueur allemande".

Thomas Müller, le caméléon du Bayern

24 ans et une carrière riche, auréolée de tous les titres majeurs en club. Thomas Müller n'a pas encore atteint l'âge de maturation pour un attaquant dans un club aussi important que le Bayern, et pourtant, il n'a déjà plus rien à prouver. Rien ne laissait présager un tel début de carrière pour cet enfant de Bavière, mais à force de travail et persévérance, l'homonyme du meilleur attaquant allemand de l'histoire et du Bayern, a réussi à se faire sa place et prouver qu'il était l'un des meilleurs atouts offensifs du football mondial.

Des débuts encourageants... non récompensés dans les moments clés du Bayern


Thomas Müller n'a que 10 ans lorsqu'il est repéré par le Bayern Munich. L'ancien du TSV Pähl arrive dans son nouveau club durant une période riche en émotions, entre la terrible défaite subie au Camp Nou face à Manchester United en 1999, et la victoire au bout du suspense face au FC Valence en 2001 à San Siro. Il ne fallait rien de plus pour faire rêver un môme de 10 ans. Les années passent et le jeune Thomas passe toutes les catégories de jeunes, jusqu'à la consécration lors d'un match de championnat d’août 2008. Jürgen Klinsmann, l'entraîneur bavarois de l'époque, le lance dans le grand bain face à Hambourg pour lui montrer la tâche ardue qui l'attend.

Malgré son titre de champion glané quelques mois plus tôt, le Bayern Munich a connu une saison 2007/2008, où il a dû ronger son frein en participant à la Coupe de l'UEFA, où il devait se frotter à des équipes comme Anderlecht, Getafe ou le Zénith Saint-Pétersbourg, contre qui le club allemand a subi une lourde défaite en Russie (4-0). L'idée était de relancer le club en intégrant petit à petit les jeunes issus du centre de formation pour qu'ils puissent goûter au haut niveau et perdurer au club. Müller, pour ne pas se griller trop rapidement, joue en Regionalliga Sud, l'équivalent de la troisième division. Il y inscrit 15 buts en 32 matchs et se fait remarquer grâce à ses prestations convaincantes, ce qui lui vaut de faire quelques apparitions avec l'équipe première. Il inscrit d'ailleurs son premier but sur le terrain du Sporting Portugal, en huitièmes de finale retour de la Champion's League, lors de la large victoire du club allemand (7-1), son premier but en professionnel. Un but annonciateur du rôle majeur qu'il aura dans les grosses rencontres.

L'arrivée de Louis Van Gaal la saison suivante change tout. Le technicien néerlandais est connu pour être un pionnier dans la construction des grandes équipes, et il compte sur les jeunes du centre de formation pour accélérer le processus de reconstruction du club bavarois. Après la génération 83/84, représentée par Lahm et Schweinsteiger, c'est autour de la génération 89/90 de faire son trou au sein de l'effectif professionnel. Badstuber, Contento et Müller sont les heureux élus, et prennent part aux rencontres disputées par le club. Müller se fait vite sa place sur le front de l'attaque du Bayern, et profite des blessures récurrentes de Robben et Ribéry pour s'installer peu à peu dans le XI bavarois.

Thomas Müller dispute tous les matchs de Bundesliga et met 13 buts, un total encourageant pour une première saison. Cependant, il a souvent marqué contre des petites équipes et n'a pas pesé face aux gros. Le Bayern remporte le doublé coupe/championnat, mais est battu en finale de la Champion's League par l'Inter de Mourinho. Müller n'a pas eu le même rendement sur la scène européenne qu'en championnat. Ses matchs face à la Fiorentina, Manchester United et l'OL ont été moyens. Malgré la défaite concédée au Bernabeu devant la défense centrale composée par Lucio et Samuel, Müller a réalisé une belle finale en ayant eu plusieurs fois l'occasion de tromper Julio Cesar. Cette défaite au goût amer pour le club bavarois, est un des nombreux points qui va façonner le jeune joueur allemand tout au long de son début de carrière, faisant naître chez lui un sentiment de revanche qui sera le moteur de sa motivation.

La déception de Müller en finale de Champion's League face à l'Inter.


Stagnation, coup de mou... masqué par une présence plus marquée dans les gros matchs


Le statut de Müller a changé après le Mondial 2010. Le numéro 25 du Bayern Munich ne peut plus avancer masqué et doit assumer son nouveau rôle au sein de l'effectif bavarois. A l'image de son club, le joueur semble marquer le pas et subir le contre-coup sur le plan physique de la saison précédente. Le Bayern doit faire face à une nouvelle donnée qu'ils n'avaient pas prise en compte à l'entame du championnat: l'éclosion d'un vrai rival en championnat, capable de perdurer sur le moyen terme grâce à une politique de formation et de recrutement intelligentes, le Borussia Dortmund. Le club du "Nordrhein-Westfalen" semble être plus qu'un caillou dans le crampon du Bayern et l'oblige à être repoussé dans ses retranchements.

Distancés en championnat, les joueurs bavarois ont du mal à se faire remarquer dans les matchs à enjeu, Müller compris. Le huitième de finale de Champion's League est un remake de la dernière finale. C'est l'occasion idéale pour Müller et ses coéquipiers de prendre leur revanche sur l'Inter. Müller avait marqué contre un club italien au premier tour, la Roma, et récidive lors du match retour face au club milanais. C'est insuffisant pour le Bayern, qui éliminé par le tenant du titre. Là où le bât blesse pour le club d'Uli Hoeness, c'est qu'il est non seulement distancé par le Borussia Dortmund en championnat, mais aussi par Schalke qui atteint les demi-finales de la Champion's League la même saison. La saison est blanche pour le Bayern, Müller a les mêmes statistiques que la saison précédente mais a montré une évolution positive dans ses prestations, marquant de manière plus régulière dans les matchs face à des adversaires plus coriaces.

La saison 2011/2012 est plus compliquée pour le natif de Weilheim in Oberbayern. Jupp Heynckes prend les rênes du club et privilégie un milieu de terrain plus dense. Müller reste un titulaire indiscutable au sein de l'effectif bavarois, mais est moins en vue, Toni Kroos s'étant fait sa place dans l'entrejeu bavarois et favorisant un jeu plus axial, mettant de côté de manière temporaire Thomas Müller. S'il est moins efficace en n'inscrivant que 7 buts en jouant tous les matchs de championnat, il devient de plus en plus dangereux dans les confrontations opposant le Bayern aux grands clubs européens. Il réalise deux matchs complets face au Real Madrid en demi-finale en pesant sur la défense madrilène, et inscrit le but de la finale face à Chelsea, à domicile. Ce but ne suffit pas pour remporter le titre, mais prouve une nouvelle fois que le joueur allemand est de plus en plus redoutable quand il faut être présent.

Malgré leur joie, les Bavarois voient Chelsea porter la coupe aux grandes oreilles dans leur antre de l'Allianz Arena.


Une machine de guerre qui ne fait plus de cadeau


Thomas Müller accumule les déceptions. Ses bonnes prestations dans les gros matchs ne sont pas récompensées. Le Borussia Dortmund s'est installé comme patron du championnat et le Bayern n'arrive pas à s'imposer sur la scène européenne, à l'image de la NationalMannschaft qui est toujours placée mais qui ne gagne plus. Le début de saison 2012/2013 du club et de Müller est bon, malgré quelques accrocs en Champion's League, où le BATE Borisov pose quelques problèmes au club, et la concurrence ardue du FC Valence pour la première place du groupe. Cependant, on note des signaux positifs au sein de l'effectif bavarois, qui semble pouvoir se passer plus facilement de certains joueurs, chose qui n'était pas forcément le cas auparavant. Müller ne dispute pas tous les matchs en championnat comme il l'avait fait lors des trois saisons précédentes. Heynckes le préserve de temps à autre et on voit un Müller plus frais et plus fringant.

La phase finale de la Champion's League 2012/2013 est sans équivoque. Thomas Müller donne l'impression d'avoir retenu les leçons du passé et atteint un niveau impressionnant face à des adversaires censés être plus attentifs et difficiles à transpercer. Müller réalise un match parfait à l'Emirates Stadium face à Arsenal en inscrivant le second but de son équipe (3-1). Il récidive en quart de finale face à la Juventus, en pesant de manière incessante sur le trio défensif italien Barzagli-Bonucci-Chiellini puis en marquant le second but du match aller, qui met son équipe sur les bons rails.

Mais le véritable tournant, il a lieu lors de la double confrontation face au FC Barcelone. Cette demi-finale face à l'une des meilleures équipes de l'histoire est l'occasion parfaite pour le Bayern, et pour Müller surtout, de tirer un trait sur les défaites récentes dans la plus prestigieuse des compétitions européennes, et d'aller de l'avant de manière à reprendre le flambeau du club catalan, quelques semaines après l'annonce de l'arrivée de Pep Guardiola en Bavière. Müller inscrit un doublé à l'Allianz Arena (4-0) et met le troisième but au Camp Nou (3-0), après avoir ridiculisé la défense catalane durant tout le match. Même s'il ne marque pas en finale face au Borussia Dortmund, il participe grandement à la victoire face au rival allemand.

Il termine la saison sur un bilan remarquable, 23 buts et 14 passes décisives en 47 matchs, dont la plupart dans des matchs à enjeu, qui ont permis au Bayern de réaliser le triplé. Il inscrit par ailleurs le premier but de la finale remportée face au VfB Stuttgart (3-2), en DFB-Pokal, prouvant une fois de plus qu'il a évolué dans le bon sens, en se mettant en condition pour réaliser des gros matchs face aux meilleures équipes allemandes et européennes.

Müller, portant la coupe derrière laquelle il courait depuis des années.


Müller à l'heure de la sélection


Ses bonnes performances lors de sa première saison "pleine", lui ont ouvert de manière prématurée les portes de la sélection. La NationalMannschaft a atteint la finale de l'Euro 2008 avec un effectif composé de joueurs en bout de course. Neuville se faisant vieux, Kuranyi, Odonkor n'arrivant plus a réalisé des prestations honorables pour être sélectionnés, Trochowski, Hitzlsperger ne s'imposant pas, il y a de nombreuses places à prendre. Joachim Low fait appel à de nombreux jeunes joueurs, parmi lesquels Jérôme Boateng, Dennis Aogo, Marko Marin, Sami Khedira, Mesut Özil et Thomas Müller. L'attaquant allemand récupère le numéro 13 du capitaine Michaël Ballack, blessé pour la compétition.

Il ne tarde pas à se mettre en évidence, et inscrit le troisième but face à l'Australie (4-0). Comme s'il voulait se réserver, Müller reste muet face à la Serbie et le Ghana, avant de se réveiller à partir des huitièmes et d'éblouir le monde du football: un doublé face à l'Angleterre de Capello et un but dès la 3ème minute face à l'Argentine de Maradona. Le but inscrit face à l'Argentine est d'autant plus symbolique que lors du match amical qui avait opposé l'Allemagne à l'Argentine, quatre mois plus tôt, Diego Maradona avait refusé de participer à la conférence de presse d'avant-match sous prétexte qu'il ne voulait pas parler en présence d'un ramasseur de balles, qui n'était autre que... Thomas Müller. Le jeune joueur de 20 ans n'a pas oublié et à prouver à une des légendes du football qu'il est bien décidé à marquer de son empreinte le Mondial, montrant que son sentiment de revanche est d'ors et déjà exacerbé.

Malheureusement pour lui et son équipe, il est suspendu en demi-finales face à l'Espagne, absence qui se fera ressentir et qui est une des raisons pour laquelle les Allemands n'ont pas réussi à déployer leur jeu face aux futurs champions du monde. Müller inscrit un cinquième but lors de la petite finale face à l'Uruguay, et termine meilleur buteur et meilleur jeune joueur de la compétition. A seulement 20 ans.

Son Euro 2012 est moins impressionnant. Malgré une présence importante, il ne confirme pas les espoirs placés en lui lors du Mondial 2010 et ne marque pas une seule fois. Il marque tout de même 4 buts lors des éliminatoires du Mondial 2014, et est un intouchable dans le XI de Joachim Low.
Le joueur allemand a fini meilleur buteur et meilleur jeune joueur du Mondial 2010.

Müller, un profil atypique lui permet d'être performant dans les gros matchs


Müller est un cas rare dans le football moderne. Il a atteint, a à peine 24 ans, un niveau qui semble difficile à surpasser. Quelles sont les raisons de cette insolente réussite du joueur du Bayern? Si l'on suit chronologiquement sa progression, on remarque que les deux premiers techniciens qu'il a connu sont deux personnages importants du football: Klinsmann, un des meilleurs attaquants que l'Allemagne a connus, n'est pas étranger à la réussite actuelle de Müller, lui qui l'a découvert dans les équipes de jeunes. Van Gaal est lui un coutumier du fait. Peu de choses qu'il touche ne se transforment pas en or. A l'image de l'équipe des Pays-Bas qu'il est en train de redresser et qu'il tend à faire revenir sur le devant de la scène d'ici l'Euro 2016, il a repris le Bayern Munich, a remis de l'ordre dans la maison et est à l'origine de ce qu'est le club aujourd'hui. Lui aussi a un rôle majeur dans ce qu'est devenu Müller, le seul joueur formé au Bayern ayant réussi à trouver une place dans le secteur offensif aujourd'hui.

Autre remarque que l'on peut mettre en avant pour parler du profil atypique de Müller, c'est son poste. Quel est le vrai poste de Müller? Personne ne sait trop. Son adaptabilité fait qu'il peut jouer sur tout le front de l'attaque sans trop de soucis: de l'aile droite qu'il a occupée lors du Mondial 2010, au rôle d'attaquant de soutien qu'il a souvent eu avec Heynckes, en passant par le poste d'attaquant de pointe qu'il occupe parfois avec Guardiola, Müller est un caméléon qui brouille les pistes et qui pose de sérieux problèmes aux équipes adverses, quant à la manière de le marquer et de l'empêcher de sévir. Contrairement aux renards des surfaces qui jouent d'une seule manière, Müller peut en cours de match, passer d'une position à l'autre et se faire oublier. La constellation de bons joueurs qui l'entoure est bénéfique à son profil car il peut leur déléguer les tâches les compliquées, la construction du jeu, la mise en place des attaques, pendant que lui trouve le moment et l'endroit opportuns pour finaliser l'offensive.

De quel joueur est-il le plus proche? Müller est un joueur compliqué à définir. Il n'excelle en rien. Il n'a pas la puissance corporelle et la technique d'un Ibrahimovic, la vivacité et le froid d'un Messi, la vitesse, la puissance et le pied droit de Ronaldo ni le jeu de tête de Falcao. Il n'atteint jamais l'excellence dans chacune des caractéristiques qui font qu'un attaquant est d'un très haut niveau. Pourtant, il sait tout faire. Il n'y a aucun domaine où il n'est pas bon, c'est le joueur utile par excellence. Dirk Kuyt était ce genre de joueur lorsqu'il évoluait au Feyenoord, à Liverpool et en sélection hollandaise. Sa hargne, sa précision devant les buts, son sens du placement, sa disponibilité faisaient de lui un joueur d'une utilité incroyable, mettant de côté l'esthétisme dont certains grands attaquants peuvent user.

Ce profil unique allié à une formation avec les meilleurs fait de Thomas Müller un des joueurs les plus sous-estimés du football mondial. S'il n'est pas "beau" à voir, il demeure le facteur X du Bayern Munich et de la sélection allemande. Lorsque l'on demande de citer les meilleurs attaquants, beaucoup citeront Van Persie, Falcao, Agüero, Suarez, Cavani, Diego Costa... et pourtant, aucun d'entre eux n'a réalisé jusque-là ce qu'un joueur comme Müller a fait à son âge. Le fait de s'imposer dans la meilleure équipe du monde, d'en être un taulier depuis des années, d'être un pilier de la sélection allemande à seulement 24 ans, sont autant de preuves du niveau incroyable de ce joueur, qui ne fait plus de différence entre les "petits" et les "gros" matchs tant il est efficace devant les buts et dans le jeu, peu importe l'adversaire qu'il a en face de lui.
Thomas sur les traces de Gerd?

1 commentaire:

Zidane 2017 a dit…

Joueur très puissant
Ses bonnes performances LORs de sa première saison "pleine", lui Ont ouvert de Manière prématurée les portes de la sélection.
Son Euro 2012 is Moins impressionnant et Il marque tout de same 4 buts LORs des éliminatoires du Mondial 2014!